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8 septembre 2009 2 08 /09 /septembre /2009 22:34

          Les malades encore mis à l’amende

Sécurité sociale . Incapable de mettre un terme au scandale des bonus dans les banques, le gouvernement veut renchérir le coût de la santé pour les usagers. La couverture solidaire en danger.

Pas responsables, mais déclarés coupables, et condamnés à payer. Après la taxe carbone, dont l’injustice flagrante est très largement reconnue, voici donc les malades soumis, selon la même logique punitive, à la menace d’un renchérissement brutal du coût de la santé. Invoquant le creusement du déficit de l’assurance maladie, le gouvernement envisage d’augmenter de 25 % le montant du forfait hospitalier (de 16 euros à 20 euros par jour) et d’abaisser, de 35 % à 15 %, le taux de remboursement de médicaments dits à prescription médicale facultative. Il s’agit notamment d’analgésiques très répandus (aspirine, paracétamol), de médicaments contre le rhume, la constipation, de vasodilatateurs…

10 milliards d’euros de déficit

En augmentant d’un euro le forfait hospitalier, « on fait rentrer dans les caisses de la Sécurité sociale 80 millions », fait valoir le ministre du Budget, Éric Woerth. Une hausse de 4 euros générerait donc 320 millions euros. Une pichenette, en termes purement comptables, au regard d’un déficit de l’assurance maladie avoisinant les 10 milliards d’euros. Mais, en termes de droit aux soins, un coup pouvant être lourd de conséquences pour les malades. « Cela reviendrait à facturer 600 euros pour un malade hospitalisé un mois, ce qui augmente de façon exorbitante le reste à charge des malades », notait, hier, le syndicat UNSA. Les frais dits d’hôtellerie, que le forfait est censé couvrir, atteignent les « tarifs de l’hôtellerie de tourisme », remarque la CGT de son côté.

Déjà, selon des enquêtes, 14 % des Français déclarent renoncer à des soins pour des raisons financières. Un phénomène qui risque de s’aggraver du fait des conséquences de la crise sur les budgets des ménages, et sachant que les mesures envisagées viendraient s’ajouter à la longue liste de déremboursements de médicaments, de franchises diverses, décrétés ces dernières années.

Comme à chaque fois, le gouvernement tente d’en minimiser la portée, en soulignant que les assurances complémentaires prennent en charge le forfait hospitalier. Il « oublie » seulement « que 7 % des Français n’ont pas les moyens de se payer une complémentaire », relève la FSU. « Ce sont donc une nouvelle fois les plus pauvres » qui trinqueront le plus. Mais les autres ne seront pas épargnés. Car les assurances risquent fort de tirer argument de cette hausse pour augmenter leurs cotisations.

L’annonce de ces « pistes » a suscité, dès hier, de très vives réactions. « Le gouvernement veut-il remplacer la carte Vitale par la Carte bleue ? » interrogeaient les sénateurs PCF, dénonçant une volonté gouvernementale de « déconstruire progressivement, loi après loi, ce modèle social », reposant sur la solidarité, construit en 1945, dans le but de « transférer la majorité des dépenses de santé de la Sécurité sociale vers les mutuelles complémentaires ». Même constat de la part du Ciss, collectif regroupant des associations d’usagers de la santé, qui voit se poursuivre « le travail de sape de la couverture solidaire ». « À ce train de réductions annuelles, calcule le Ciss, l’assurance maladie ne couvrira pas plus de 50 % de nos dépenses de santé en 2025. » Le secteur de l’assurance privée verrait son marché élargi d’autant. Lors du dernier congrès de la Mutualité, en juin, Nicolas Sarkozy a affirmé son intention de confier aux complémentaires une part croissante de la couverture maladie. En passant allègrement sur le fait qu’avec ces organismes, qu’ils soient à but lucratif ou mutualistes, on quitte le principe de base de la Sécu, celui d’une couverture garantie à tous, sans distinction de revenus.

pas de véritable débat

En menaçant de faire payer de nouveau les assurés, le gouvernement tente d’éviter l’ouverture d’un véritable débat sur le financement de la protection sociale. L’explosion du déficit est avant tout le produit de la montée du chômage, qui assèche les caisses de la Sécu, mais aussi des nombreux allégements et exonérations de charges sociales consenties au patronat (près de 33 milliards d’euros cette année). En lieu et place du nouvel impôt sur la maladie, d’autres ressources pourraient être mobilisées pour assurer la pérennité de la Sécu. Mais la remise en question des cadeaux fiscaux accordés aux plus riches, la taxation des revenus financiers, ceux des traders et ceux des entreprises, des actionnaires, réclamerait plus de courage politique que le choix de faire payer l’assuré de base.

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